L’ailier droit du FC Lorient, Stéphane Diarra, surfe sur une dynamique nouvelle pour contribuer au meilleur début de saison de l’histoire du club breton. L’occasion de se confier sur cette période faste avec une grande sincérité.
C’est sur le podium, derrière le Paris Saint-Germain et l’Olympique de Marseille, que le FC Lorient aborde le deuxième quart de sa saison. Une prouesse historique pour ces Merlus épatants, portés par un style et une méthode. Ce qui laisse à penser que cette équipe-là, à l’aube de l’automne, n’a pas simplement l’allure d’un tube de l’été.
Maillon important du puzzle de Régis Le Bris, Stéphane Diarra revient de loin. Présenté à son arrivée en 2020 comme un diamant à polir, le natif d’Abidjan a tout connu dans le Morbihan : les coups durs et les blessures, l’espérance, la renaissance.
Du haut de ses 23 ans, ce dribbleur déroutant a choisi Foot 365 pour raconter sa trajectoire. Dans son discours, la notion de collectif revient toujours, comme pour illustrer ce qui se trame dans ce petit coin de Bretagne, où le jeu passe avant le ‘je’. Entretien.
Tu as connu de nombreuses péripéties depuis ton arrivée au FC Lorient. Après les pépins physiques – plusieurs rechutes d’une élongation à la cuisse – une nouvelle saison débute pour toi. Comment vas-tu ?
Stéphane Diarra : Je vais bien, Dieu merci. C’est vrai que j’ai eu pas mal de péripéties ces deux dernières années. Aujourd’hui, j’ai changé des choses, des petits détails dans ma vie qui me permettent d’être au maximum sur le terrain. Je me sens bien. Je suis heureux. J’évolue bien. Je peux enfin jouer au football et montrer mes qualités à fond.
« Je monte en régime en même temps que l’équipe »
Quelles sont tes sensations depuis ton retour en compétition ?
Je pense que j’ai encore beaucoup à montrer. Je ne suis pas totalement à 100%, même si j’essaie de donner le meilleur de moi-même. Le Stéphane Diarra qu’on voit en match, ce n’est pas celui qui peut tout retourner. Je n’avais pas été titulaire depuis novembre dernier. J’ai encore des matchs où je prends du rythme. Physiquement, je me sens de mieux en mieux… Sur le plan de la confiance aussi. Je pense que je suis en train de monter en régime en même temps que l’équipe, qui réalise un bon début de saison.
Tu viens justement d’enchaîner trois titularisations, contribuant pleinement à la dynamique positive de ton club. Tu sens que ton influence grandit ?
Je ne pourrais pas franchement qualifier mon influence parce qu’on gagne collectivement, tous ensemble. Mais je sens que le degré de confiance, avec ce que le coach et mes coéquipiers m’apportent, me permet de les aider au maximum. Ce n’est pas clairement mon influence parce que chaque joueur apporte sa pierre à l’édifice dans le onze… et même dans les dix-huit joueurs avec les remplaçants qui rentrent. Ce n’est pas individuel. Tous les efforts que je fais, c’est par rapport à l’équipe.
On dit que les épreuves rendent plus fort. Ce n’est pas qu’un cliché…
Exactement. Ce que j’ai vécu l’année dernière m’a clairement forgé. Il y a eu des remises en question. Le fait que je ne joue pas après un bon transfert la première année, puis une deuxième année tronquée par les blessures… Je me dis que je n’ai plus rien à perdre. Pourquoi ne pas tout donner sur le terrain et tout essayer ? Si je suis en bonne santé et que j’ai l’occasion de jouer au football, il ne peut rien m’arriver de mieux.
« Le coach réalise un formidable travail pour tirer le meilleur de nous-même »
Au-delà des résultats, il y a la manière. Régis Le Bris a réussi à fédérer un groupe autour d’un projet de jeu. Est-ce que la plus grande force du FC Lorient se situe là ?
Tout à fait. Il a réussi à fédérer l’équipe. Comme je l’ai dit, chacun apporte sa pierre à l’édifice. Il n’y a pas que les défenseurs qui défendent, les milieux qui donnent de bonnes passes et les attaquants qui marquent. Aujourd’hui, dans le onze, tout le monde doit défendre, tout le monde doit attaquer, tout le monde doit protéger son but… Le coach réalise un formidable travail pour tirer le meilleur de nous-même. Il nous permet d’exprimer le meilleur de nous à chaque instant. En match bien-sûr, mais aussi à l’entraînement, où il est très exigeant sur ce qu’il veut. On fait pas mal de vidéos… Il ne faut jamais se reposer sur nos lauriers. On est toujours dans les détails pour améliorer certains points.
Votre entraîneur répète souvent qu’il ne recherche pas la possession à tout prix, mais que chaque temps de possession doit mettre en difficulté l’adversaire, dès la récupération du ballon : n’est-ce pas finalement un contexte idéal pour un joueur de percussion comme toi ?
Oui, parce que ce n’est pas une possession stérile. C’est une possession pour faire mal. On ne conserve pas le ballon pour le conserver. On attire l’adversaire pour mieux piquer derrière et jouer sur nos qualités, c’est-à-dire attaquer la profondeur avec les trois joueurs de devant.
Si on se concentre sur les phases sans ballon, ta progression se reflète aussi à travers ton activité défensive. Régis Le Bris insiste beaucoup là-dessus ? C’est quelque chose que tu travailles davantage ?
Clairement, oui. Le coach répète que tout le monde doit aider l’équipe à sortir le ballon, personne ne doit se cacher. Si moi je sors de mon poste, ça doit être complété par un autre joueur. C’est un travail de coordination de toute l’équipe. On ne doit en aucun cas se retrouver en déséquilibre. Si moi je ne me retrouve pas à droite et que le ballon est bloqué à gauche, il faut que quelqu’un se déplace. Ça m’aide énormément. Je n’avais par exemple jamais réfléchi à me déplacer dans le cœur du jeu comme ça alors que ce n’était pas mon rôle. Dans cette position intermédiaire, à la base, avant d’attaquer, c’est vrai que je me sens bien. Défensivement, je fais énormément d’efforts. Et je dois continuer pour aider l’équipe parce que c’est ce qu’on demande à un attaquant dans le football moderne.
« Je faisais 61 kilos, j’en fais 67 et demi »
Par rapport à tes débuts en Ligue 1, tu sembles plus mature dans ton jeu.
J’évolue. Je commence à devenir un joueur complet, je gomme les aspects négatifs de mon jeu.
Sur le plan athlétique, tu as expliqué être devenu un nouveau joueur. C’est un paramètre primordial pour t’épanouir en Ligue 1 ?
Oui. Je le développe encore aujourd’hui. Je travaille pas mal avec le staff. Avec Pierre Bazin (préparateur physique, ndlr) et Romaric Boch (préparateur physique adjoint). J’ai aussi travaillé avec un coach personnel, qui m’avait soigné pour ma dernière blessure. Nous sommes restés en contact et il monte de temps en temps à Lorient. Il faut savoir que quand je suis arrivé à Lorient, je faisais 61 kilos. Aujourd’hui j’en fais 67 et demi. Je continue à beaucoup travailler sur l’aspect physique. J’ai pas mal de séances de musculation sur le haut et le bas du corps, quatre séances par semaine pour continuer à progresser sur ce plan. La Ligue 1 est physique. Il faut être costaud pour être performant à ce niveau.
Crédit photo : DK Sport Consulting.
Cette épaisseur, tu la ressens comment sur le terrain ? Dans les contacts ? Les accélérations ?
Un peu à tous les niveaux. J’ai toujours subi pas mal de fautes mais je suis de moins en moins impacté par ces fautes. Dans mes accélérations, je me sens plus fort. Dans les contacts en un contre un avec mes adversaires aussi… Passer devant, faire une double accélération, ou bien freiner et changer de direction. Tout ça m’aide dans toutes les parties de mon jeu. Au niveau du gainage aussi, et de la mobilité parce que je fais pas mal de stretching, du yoga – et pas du yoga ‘détente’. J’en fais deux fois par semaine avec le club.
Quel est ton plus gros point fort selon toi ?
Je dirais le dribble, la percussion, la vitesse. Le fait d’appuyer sur l’équipe adverse, de la déstabiliser pour me créer des brèches ou en créer à mes partenaires. Je pense que c’est ça aujourd’hui qui m’a emmené en Ligue 1 et qui fait ma force.
Et ton axe de progression majeur ?
L’efficacité. Je dois être plus efficace offensivement et défensivement, dans les deux surfaces. Je dois aider davantage mon équipe avec des buts et des passes décisives.
Par rapport à ton profil justement, avais-tu une idole à laquelle tu t’identifiais plus jeune ?
Il y a un joueur qui me vient en tête directement, c’est Arjen Robben. Je regardais encore des vidéos de lui avant de me coucher quand j’étais petit. C’est vraiment un joueur dont le football me parle. J’aimerais discuter un jour avec lui pour voir comment ils réfléchit. Ils m’a inspiré et il m’inspire encore aujourd’hui.
« On ne sait pas où ça va s’arrêter, on prend du plaisir »
Depuis le début de ta carrière, les observateurs parlent beaucoup de ton potentiel. C’est quelque chose de difficile à appréhender pour un jeune qui entre dans le grand bain ?
Non, sans arrogance. Au contraire, c’est plutôt flatteur. Cela peut être aussi une pression mais moi je ne l’ai pas pris comme ça. Dans le football, ça va vite dans les deux sens : tu peux être tout en haut un jour et tout en bas le lendemain… On croit en moi : pas de soucis, je continue de faire le football que j’aime et de progresser. On verra où je vais aller, où sont mes limites. Jusqu’à aujourd’hui, je ne les ai pas trouvées parce que j’ai un mental d’acier à toute épreuve. Je prends du plaisir. Je n’ai pas de pression.
Quels sont tes objectifs individuels pour cette saison 2022-23 ?
Mon objectif, c’est d’aider au maximum mon équipe en jouant le maximum de matchs et en étant le plus décisif possible. Je veux contribuer à ce que mon équipe soit toujours aussi performante. Et individuellement, marquer des buts et être décisif par la passe.
Et sur le plan collectif, que peut viser le FC Lorient ?
Il y a une certaine effervescence. On fait même le meilleur début de saison de l’histoire du club. Aujourd’hui, ce n’est pas trop dans nos têtes. On fait le maximum. On ne sait pas où ça va s’arrêter, quand ça va s’arrêter… Mais on travaille tous les jours. On verra où on ira. On prend du plaisir chaque week-end.
Tu es né en Côte d’Ivoire, à Abidjan. Tu as aussi la nationalité française. Intégrer une sélection à terme, c’est un objectif que tu as dans un coin de ta tête ou tu es vraiment focalisé sur ta progression en club pour le moment ?
En toute honnêteté, je suis vraiment focalisé sur ma carrière en club. La sélection, c’est bien, c’est un plus. Mais ce sont mes performances qui m’amèneront un jour en équipe de France ou de Côte d’Ivoire. C’est ça qui me fera remarquer. J’essaie juste d’être performant au maximum avec mon club. Et quand je recevrai un appel, je répondrais avec le cœur, avec fierté. Je n’ai pas fait mon choix, mais je suis quand même né en Côte d’Ivoire et j’ai grandi en France. Donc c’est un choix difficile… On verra quand le moment se présentera.
Propos recueillis par Jean-Charles Danrée.
Remerciements : DK Sport Consulting.
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